Richard nous propose un post sur la Frida de Marko qui reste une fresque de synthèse importante et un exemple du talent de Marko.
Alors que dAcRuZ a été l'objet de la vindicte de Nite et sa bande de tagueurs, Marko avait décidé de reprendre son portrait de Frida Kahlo, superbe portrait dont nous avions proposé dans ces colonnes une brève analyse. Le projet de Marko était de garder le thème du portrait de Frida et d'appliquer une technique qu'il avait expérimentée par ailleurs : le vitrograff. Ne cherchez pas ce mot, c'est un néologisme créé par Marko, pour qualifier un cloisonnement des surfaces en aplats comparables à des vitraux, d'où le nom de "vitro" et de "graff" pour renvoyer aux peintures des murs avec des bombes aérosols.
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Cette composition rayonnante et ce cloisonnement des surfaces évoquent bien sûr les vitraux. Les surfaces sont fractionnées par des segments géométriques qui rompent avec le calligraffisme de Marko (souvenons-nous du décor de sa cabine téléphonique par exemple). Les volutes, les boucles, les courbes sont délaissées au profit d'un réseau décoratif majoritairement constitué de segments et de petites courbes. Le rapport à l'écriture, à la calligraphie n'est pas recherché. Il s'agit d'apparenter la surface colorée au maillage des vitraux qui sont les formes et les couleurs de référence. Références certes, mais références culturelles dépassées, revisitées par un artiste du XXIe siècle qui, avec des bombes aérosols comme les compagnons qui construisirent les cathédrales du Moyen Âge, essayèrent de créer grâce aux vitraux une lumière "céleste". Apprivoiser la lumière, la capturer, la "rendre", un rêve vieux comme l'Art. Prendre en compte l'héritage, poursuivre le chemin, c'est ce que fait modestement Marko. Examinons par exemple le visage de sa Frida. Comme sa première Frida, le portrait est beaucoup plus beau que l'original (c'est l'autoportrait rêvé de Frida), Marko garde ce qui l'intéresse, les fleurs dans les cheveux, il rajoute des bijoux qui n'ont jamais existé (la lumière !) et fractionne le visage non pas en zones d'ombre et lumière mais d'une autre manière qui n'a rien à voir avec le réel tout en ménageant une relative lisibilité (le cou réduit en bandes verticales est vu comme le cou de Frida). C'est donc un compromis entre l'abstraction d'une partie du décor, le schématisme du singe blanc et du perroquet et le vitrograff utilisé pleinement pour le portrait de Frida.
Dans sa Frida 2, Marko a écrit une citation de Frida Kahlo dont je sais qu'il partage profondément l'esprit : "Je ne suis pas malade... Je suis cassée... mais je suis heureuse d'être en vie pendant que je peux peindre". Frida 1 et Frida 2 sont des hommages post mortem mais ils nous parlent aussi de Marko qui pense ce qu'il écrit, qui cherche inlassablement la lumière.
Ne soyons pas dupes, sous la mousse, sous l'éclat des peintures fluo, il y a un homme sensible qui nous parle et si nous prêtons l'oreille nous l'entendons ; c'est un artiste, il y a de belles choses à nous dire. Alors, silence. Regardons.
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