Si, contrairement à ce qu'affirmait un peu prématurément un journal, le bassin de La Villette n'est pas devenu un spot incontournable du street art à Paris, il n'en demeure pas moins que des "pointures" sont passées par notre quartier et y ont laissé des œuvres remarquables. Nombreux sont les "gens du milieu" qui connaissent la rue de l'Ourcq et la rue Germaine-Tailleferre.
Un artiste, un artiste véritable, qui utilise le collage est récemment passé rue des Ardennes et quai de l'Oise,
Levalet. Dans ce blog, nous vous avons montré ses quatre collages. Pour mémoire, il convient de se remettre en mémoire trois d'entre eux situés dans un tout petit périmètre.
Chronologiquement, le premier collage a été fait avant les vacances d'été sur une voûte du pont de la Petite Ceinture. Quand je l'ai découvert, j'ai regardé quelle technique était utilisée : un dessin à l'encre de Chine sur du papier kraft et un cercle tracé à l'acrylique. Étonnant. Des affiches reproduites par photocopie, on en trouve des kilos, un peu partout. Là, le dessin de l'homme est fait main, tout comme le grand cercle. Le nez collé sur le collage, je n'ai pas compris la signification de l'œuvre, me bornant à conclure que c'était bien mais futile, au sens de sans grand intérêt.
Des semaines plus tard, j'ai découvert sur une pile du pont de l'Ourcq deux affiches. La technique était la même, les styles semblables et la signature illisible. Profitant d'un instant de lucidité et d'intelligence (moments de plus en plus rares !), j'ai compris le sens des deux affiches. Il faut voir les tuyaux. Tout est là : dans les tuyaux. Deux ouvriers d'un temps révolu alimentent une chaudière. Faisant le rapport avec la première affiche, j'ai enfin compris que l'homme avait découpé une ouverture sous le pont pour s'y introduire.
Autre moment de cette quête de sens, notre blog publie les images des affiches et révèle le nom de leur auteur, Levalet. Le temps de rentrer le nom dans un fameux moteur de recherche sur Internet et je découvre le talent d'un artiste de premier plan.
Les œuvres sont remarquables pour deux raisons : la raison essentielle est que l'image proposée par l'artiste résulte d'un subtil jeu avec les éléments de l'environnement urbain. C'est l'analyse du "paysage" qui est à la source de l'inspiration. Dit autrement, les collages sont faits sur mesure ; la seconde raison est d'ordre technique. Les dessins à l'encre de Chine sont uniques et, après avoir découpé l'œuvre, si cela est nécessaire, Levalet, à la peinture ajoute ce qui manque. Plus profondément, le regard de Levalet sur la ville est drôle, poétique, surprenant. La ville et ses formes sont un immense terrain de jeu (de l'esprit). Les œuvres ne recherchent pas tant la beauté que la surprise. Le badaud, le chaland, le promeneur rit, sourit, s'émerveille de voir autrement ce qu'il voyait dans la monotonie de son quotidien.
Les liens avec certaines œuvres de Banksy sont évidents. Les différences tiennent au discours de Banksy souvent politique et à la technique d'expression. Banksy utilise les formes de la ville, ses accidents, ses ruptures avec une vision pleine d'humour.
Si Banksy est probablement le nom d'un collectif, Levalet travaille seul. Pas de crew, d'assistants en pagaille, de photographes qui immortalisent les œuvres dès leur production avant qu'elles soient recouvertes ou arrachées, de vidéastes qui filment le making-of pour le mettre en ligne. Levalet, du moins pour l'heure, travaille pour faire plaisir aux passants, pour les distraire.
Nous avons là, chers lecteurs, un artiste (et non un tiroir-caisse).
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